Un parfum de Dire StraitsLe point - 22.09.2000 par Alors ? « Dire Straits était devenu une machine énorme, soupire l'intéressé. La dernière tournée, gigantesque, a dépassé ce que je pouvais supporter. Trop de camions, trop de personnel, trop de problèmes qui n'avaient plus rien à voir avec la musique. Je dépensais toute mon énergie à faire avancer cette machine et je me suis senti bloqué artistiquement. » Il revient aujourd'hui affranchi, pour toujours (dit-il), de ce nom devenu trop populaire et aspire à un chemin artistique tranquille, émaillé de petites tournées dans de petites salles. La dernière, en compagnie des Notting Hillbillies, où officiait un autre traumatisé de la gloire, George Harrison, l'ex-Beatles, s'était déroulée dans des bars. Impossible de faire plus petit ! « C'est vrai qu'à mes débuts j'aspirais à devenir une rock-star, dit-il. Mais j'en ai marre, tout cela est tellement dérisoire et réducteur ! Le succès est rassurant, surtout quand on ne fait pas de concessions pour l'obtenir, mais la célébrité est négative. Je viens de terminer la musique d'un film pour Robert Duvall, une autre pour un dessin animé. En fait, contrairement à ce que vous pouvez penser, je ne me suis jamais arrêté de travailler, mais je choisis des projets qui ne m'obligent pas à monter en première ligne. J'aspire à me maintenir dans un certain anonymat. » Un discours sincère et d'autant plus facile à tenir que son auteur est milliardaire et, reconnu comme un des plus grands guitaristes de notre époque, n'a plus rien à prouver à personne. Son album « Sailing to Philadelphia » possède la sérénité et l'assurance décontractée de l'oeuvre qui a été conçue sans urgence et sans pression par un artiste bien dans sa peau. « Je ne suis pas de ceux qui fonctionnent mieux dans le stress », dit-il. On y entend deux invités de marque, Van Morrison et James Taylor. Le premier est un ami de longue date et le second attend que Mark Knopfler accepte de le produire pour un album entier. « Je le ferai s'il se remet vraiment au travail et recompose pour lui, dit Knopfler, mais il est un peu paresseux. » L'année prochaine, Mark Knopfler partira peut-être en
tournée. Il faut qu'on la lui promette pépère, sans trop de camions ni de
fans en délire. Mais que se passerait-il si Mark Knopfler devenait aussi célèbre
que Dire Straits ? Il se fige. « Je n'avais pas pensé à cela. » Et il réfléchit.
« Naaaan, impossible. Tout a changé. Pour les mômes qui achètent des disques
et qui vont en concert, je suis un vieux machin sans intérêt. Non, pas de
risques que cela se produise, je suis tranquille. Vous m'avez fait peur. » Mais
a-t-il pensé à Santana ? Ce vieux hippie vétéran de la campagne de Woodstock
qui, à la surprise générale, est devenu le numéro un mondial et la nouvelle
idole de la génération mtv ! Il semble réellement catastrophé. « Ne me
parlez pas de malheur », bougonne-t-il en prenant congé. Je sens que je lui ai
gâché sa journée. C'est malin ! |